Le jeu vidéo de 2020
Les années 2000 ont été marquées par une poussée des capacités des ordinateurs et consoles de jeux. Indépendamment des observations émises par Gordon Moore, c’est aussi aux programmeurs que l’on doit ces prouesses.
Un bon jeu est un jeu avec de l’interactivité, de l’immersion et du fun. Grâce aux avancées techniques (hardware puissant, réalisme de la physique et des graphismes) et à l’amélioration du gameplay, cela promet de bonnes choses.
Je sort la boule de cristal: petit tour d’horizon de notre avenir vidéo-ludique.
Photoréalisme
Les générations actuelles de moteur 3D (Frostbite 2, CryEngine 3,…) ou à venir (Unreal Engine 3, Outerra,…) sont déjà très impressionnantes visuellement et techniquement (Outerra avec son système fractal de visibilité infinie sans transition est bluffant).
Mais ces moteurs reposent sur l’utilisation de polygone 3D. Leur nombre et donc le détail des objets qu’ils composent, ne cesse d’ailleurs d’augmenter dans nos jeux.
Malgré certaines astuces (tesselation) l’aspect anguleux des objets ressort dès que l’on s’en approche de trop près. De plus la puissance du matériel nécessaire pour porter à l’écran (et animer) tout cela reste un facteur limitant, en tout cas pour la config du joueur moyen.
D’autres compagnies explorent d’autres voies, comme l’utilisation de voxels.
Le buzz a commencé lorsque la société Euclideon a mis en ligne une vidéo de son nouveau moteur 3D (Unlimited detail). Soit-disant 100 000 fois plus performant que ceux utilisés à l’heure actuelle.
Fondamentalement, le moteur remplace les polygones par des “nuages d’atomes”. Il existe des systèmes similaires dans le domaine médical, mais ils sont limités à l’affichage d’une poignée de modèles détaillés en même temps.
Euclideon affirme que très bientôt ce moteur sera capable de gérer autant de données voulues et qu’un jeu entier pourra être construit avec.
Ce serait le plus grand bond en avant pour les graphismes de jeux depuis le passage des sprites aux polygones.
Mais le système a de nombreux sceptiques. Marcus “Notch” Persson, le développeur de Minecraft, s’indigne contre cette fausse démo technique basée sur des technologies connues (voxels) et tout juste bonne à permettre à Euclideon de lever des fonds. Même John Carmack, le papa de Doom, émet des doutes quand à l’utilisation dans un avenir proche de cette technologie pour la création de jeux.
De plus, ça et là sur le net, on pointe du doigt les nombreuses lacunes de cette vidéo: éclairage plat, pas d’animation, juste un décor, très détaillé certes mais essentiellement composé d’instances d’un petit nombre de modèles.
Pour autant Euclideon ne semble pas être la seule compagnie sur le segment de la modélisation par “atomes 3D”.
Atomontage propose également des vidéos explicatives sur sa technologie, basée sur différents types de voxels. Animation de véhicules, destruction d’objets et déformation du terrain en sont des caractéristiques alléchantes (imaginez tout ça dans un jeux de rallye…)
Si le degré de détails dans la modélisation de nos mondes virtuels est encore relativement rudimentaire, l’éclairage et le rendu optique (subsurface scattering, réflexions et caustiques, occlusion ambiante, HDR, profondeur de champ…) sont les points forts des moteurs 3D actuels.
(ci-dessus: occlusion ambiante Off puis On)
Cependant il reste une marge de progression importante. Notamment en passant d’un rendu réalisé en “restitution par tracé d’image par ligne” (scanline rendering, typiquement avec Direct3D ou OpenGL) vers le ray-tracing (ou le photon-mapping peut-être) en temps réel.
Le véritable avantage du rendu par rayon est l’ajout d’illumination globale et de radiosité, qui renforcent l’aspect réaliste d’une image.
Nvidia avec sa gamme pro Quadro et l’utilisation de CUDA possède déjà une expérience de raytracing temps réel (ci-dessus) qu’on souhaite voir passer du monde de la 3D classique au monde du jeu…
Physique et animation adéquates
Dans les jeux actuels, la capture de mouvement exécutés par des acteurs est devenue courante. Elle apporte du naturel au comportement des héros dans nos jeux.
Cette technique à 2 limitations principales:
- le répertoire d’actions dépend du nombre de mouvements capturés. En pratique, ce nombre est relativement limité et donc les mouvements sont vite répétitifs.
- la jonction entre animations pré-rendues manque souvent de fluidité.
Les jeux qui vont sortir prochainement améliore déjà sensiblement le problème.
Max Payne 3 repose sur un nouveau moteur physique ayant un système d’animation très évolué, dont les mouvements sont très détaillés, nombreux et combinés entre eux dynamiquement selon l’action du joueur.
De plus, un système évolué de réaction à l’environnement et aux impacts de balles complète l’animation des personnages.
Tout cela est intéressant mais la véritable avancée viendra de l’animation procédurale, en particulier pour la locomotion. Voir son personnage modifier sa posture pour suivre le sens d’une pente ou grimper les marches d’un escalier sans faire des petits bonds ou flotter au-dessus du sol est un vrai plaisir…
Overgrowth (encore au stade de développement) est l’un des premiers jeu avec Crysis à s’appuyer sur ce genre de technologie)
Un autre point faible du réalisme des mouvements dans les jeux actuels est lié à la qualité très approximative des animations faciales.
2011 aura cependant été une année décisive pour l’amélioration de ces animations.
L.A. Noire, jeu d’enquête développé par Rockstar, use d’une technologie proche de celle d’Avatar pour capturer toutes les subtilités du jeu des comédiens, éléments clés dans le gameplay, reposant sur la perception de la sincérité des suspects rencontrés au cours des enquêtes.
Cette technologie devrait se répandre et être améliorer dans les années à venir. Des sociétés comme Janimation ou Image Metrics laisse entrevoir un réalisme saisissant pour les futurs personnages virtuels des jeux vidéos.
Immersion et interactivité
En 2007, le site de la BBC présentait un article sur l’avenir du jeu vidéo. “D’ici 2 ans, l’arrivée de jeux ultra-réalistes ne permettront plus de faire la différence entre un personnage de synthèse et une personne réelle.” disait en substance l’article. Si l’intervalle de temps était un peu optimiste, il est sûr que cette prédiction se réalisera à terme.
Une évolution inévitable qui devrait apporter une nouvelle dimension aux jeux…
Nous en sommes au point où nous allons pouvoir instiller le doute dans l’esprit du joueur, ce qui va nous permettre d’ajouter du contenu émotionnel aux jeux.
explique David Kunkler, producteur pour Obsidian Entertainment.
Nous serons capable de jouer avec les émotions des gens – nous pourrons les faire rire, les faire pleurer, les faire se sentir tristes.
affirme Ian Livingstone d’Eidos.
Voilà une affirmation extrêmement importante… “L’immersivité” (i.e. le degré et la capacité d’immersion d’un jeu) va augmenter drastiquement.
Quand on pense à l’impact sur la vie réelle (addiction mais aussi implication émotionnelle) qu’on des jeux comme WOW ou les Sims, on imagine sans peine la connexion qui pourrait se créer avec des personnages hyper-réalistes…
Contrôleurs et I.A.
En parallèle l’interactivité à récemment fait des bonds de géant. L’apparition de dispositifs de contrôle nouveaux (wiimote, kinect, PS move…) simplifie et rend amusante l’interaction: l’action est réalisée telle qu’elle doit être, en bougeant le corps et non de façon codé sur un clavier, avec une souris ou une manette de jeu. Et il y a encore beaucoup de place pour l’amélioration.
Mais si vous pouviez contrôler votre action dans le jeu directement à partir de vos pensées ? Il n’y aurait pas de “lag” entre ce que vous envisagez de faire et l’exécution de cette action.
Les joueurs seraient en mesure de prendre des décisions de façon éclair. Imaginez ce que deviendraient des jeux compétitifs tels que C.O.D et Battlefield: beaucoup plus rapides, rythmés, intenses…
Et bien dès 2008 Emotiv a proposé un casque de contrôle mental nommé “neuroheadset EPOC” qui permet de contrôler le fauteuil roulant électrique des patients handicapés mais aussi de “jouer“.
Plus récemment, les scientifiques sont devenus capable de collecter des signaux très faibles dans le cerveau et d’en restituer le sens. Ce sont ces nouvelles avancées qui pourraient faire du jeu sous contrôle mental une option plus qu’hypothétique.
Mais la vraie révolution pourrait venir de l’intelligence artificielle.
Avec une I.A. plus performante non seulement l’interaction avec les “ennemis” du joueur sera plus réaliste, plus stimulante pour l’intelligence du joueur mais l’implication émotionnelle encore renforcée.
En 2009 Peter Molyneux présentait Milo, le garçon virtuel, prémisses de cet aspect de l’interactivité et de la forte charge émotionnelle des jeux du futur.
Quand on sait que le temps passé à jouer est en constante augmentation, peut-être que la résolution des problèmes du monde se fera par et dans les jeux ?